A St Géry succédèrent Berthoald, issu d'une famille royale franque, qui assista au Concile de Reims, puis St Aldebert (627-633), St Aubert (633-668), et St Vindicien (669-693), ami de St Eloi. Le rôle de ce dernier fut important au plan temporel surtout, dans la mesure où c'est le premier évêque qui obtint du Roi (Thierry III en l'occurrence) des donations territoriales, dont les bénéfices étaient destinés à dégager les religieux des soucis matériels.
Cambrai, ancienne abbaye Saint Médard où fut inhumé st Géry - Mont des boeufsL'encadrement hiérarchique, on le voit, s'affirmait, et parallèlement, commençait l'expansion du monachisme et de l'érémitisme, notamment d'origine irlandaise. En effet, non affectés par les invasions barbares, des Irlandais, dont le plus célèbre est St Colomban (fin VIè, début VIIè siècle) se répandirent dans toute la Gaule du nord, surtout dans les campagnes, peu touchées par la foi chrétienne, les églises étant jusqu'alors surtout urbaines et épiscopales, et vinrent en quelque sorte, notamment par l'exemple, revigorer la diffusion du christianisme (le plus connu de ces Irlandais dans notre région est St Etton, qui s'installa à Dompierre sur Helpe).
Entre 625 et 730 environ, surgirent une vingtaine de monastères dans le diocèse d'Arras, et dans les parties actuellement françaises des diocèses de Thérouanne, Tournai et Cambrai, monastères qui prirent place très vite parmi les plus grands propriétaires fonciers de la Gaule du Nord. Deux zones furent privilégiées: la vallée de la Scarpe (St Amand, Hasnon, Hamage, Marchiennes), Arras plus en amont avec St Vaast, et la vallée de la Sambre (Maubeuge avec Ste Aldegonde, Hautmont avec St Vincent, Maroilles avec St Humbert). Dans le Cambrésis, St Vindicien fonda l'abbaye d'Honnecourt.
Ces moines, ces ermites furent indiscutablement, on l'a dit, les vecteurs de la foi chrétienne, mais la conversion fut lente, et ne s'accéléra que dans la seconde moitié du VIIIè siècle, pour s'achever pratiquement sous le règne des Carolingiens, c'est-à-dire dès la seconde moitié du VIIIèsiècle. D'autres abbayes verront le jour à la même époque, telles que celles de St Jean à Valenciennes, Ste Remfroie à Denain, St Lambert à Liessies.
A ce stade de l'exposé, il semble utile de revenir quelques instants sur l'évolution politique du territoire couvert par le diocèse de Cambrai si l'on veut mieux comprendre son histoire au cours du haut moyen âge. Le pouvoir des Mérovingiens, on le sait, passa définitivement entre les mains des Carolingiens dès la bataille de Vincy (Les Rues des Vignes) gagnée par Charles Martel, maire du palais, le 21-3-717. Une des caractéristiques de l'organisation carolingienne, qui s'épanouira sous le règne de Charlemagne, fut de placer à la tête des structures administratives, des comtes, des «missi », des abbés et des évêques, qui représentaient le souverain.
C'est à partir de cette époque que se généralisera le regroupement de la population dans des « paroisses », dans lesquelles s'intégreront d'ailleurs les cimetières, désormais implantés autour de l'église, alors qu'ils étaient jusque là, toujours situés à l'extérieur , c'est-à-dire « à la romaine ».
Ce système paroissial est même un des signes les plus nets de l'ordre carolingien, qui concrétisait en quelque sorte la volonté du souverain d'encadrer la population jusqu'à son niveau le plus modeste. A contrario, la protection impériale était acquise à l'église, au plan religieux, et même au plan temporel, comme en témoigne par exemple l'acte de confirmation en date du 15-4-816 des immunités accordées aux églises et aux biens du diocèse de Cambrai, dont l'évêque Hildoard était le titulaire, par l'empereur Louis le pieux (appelé aussi le débonnaire), fils de Charlemagne. Les terres de l'église de Cambrai devenaient donc affranchies de l'impôt et étaient désormais soustraites à la justice séculière, ce qui constituait une avancée considérable vers l'autonomie, prélude à la souveraineté ultérieure.